Dans un domaine aussi délicat et complexe que la rénovation thermique du parc de logements, les bonnes nouvelles sont rares. Alors forcément, lorsque l’Observatoire national de la rénovation énergétique (ONRE) publie la semaine dernière un état des lieux montrant que le nombre de passoires thermiques a reculé de près de 400.000 unités en un an (entre le 1er janvier 2022 et le 1er janvier 2023), l’information est largement reprise. Un recul de 7% du nombre de ces bâtiments énergivores (dont le DPE est classé F ou G) qui arrive opportunément quelques jours après un rapport assez critique de la Cour des comptes sur l’efficacité du dispositif Ma Prime Rénov. Le rapport relevait ainsi qu’après rénovation, 61% des passoires thermiques étaient toujours classées en catégorie E, F ou G.
«C’est assez surprenant de publier cette étude juste après ce rapport de la Cour des comptes, estime pour sa part Audrey Zermati, directrice stratégie de l’enseigne de rénovation énergétique Effy. Par ailleurs, certains choix méthodologiques nous étonnent comme le fait d’extrapoler les 915.000 diagnostics réalisés entre octobre 2022 et mars 2023 tout en s’en tenant à des chiffres d’occupation du parc de logements s’appuyant sur une étude de 2021.» Des choix qui peuvent effectivement susciter de sacrés biais et des «effets de bord». D’un côté, l’échantillon de logements pour lesquels on a fait un DPE ne concerne que des habitations à mettre en vente ou en location et n’est pas forcément représentatif du parc. Et de l’autre, les chiffres concernant les répartitions locataires, propriétaire, parc social etc. ne tiennent pas compte des changements qui ont pu intervenir depuis 2021.
Pressions sur les diagnostiqueurs
L’étude elle-même prévient dans ses notes méthodologiques que «ces évolutions sont à interpréter avec prudence». Elle prévient notamment qu’au-delà d’une amélioration réelle des performances du parc, l’étude peut aussi traduire «d’éventuels effets de comportement tant des diagnostiqueurs que des propriétaires». Comprenez sans doute des pressions des propriétaires pour pousser les diagnostiqueurs à faire sortir leur logement de la zone rouge… Toujours est-il que selon ces calculs, le nombre de passoire a reculé de près de 380.000 entre début 2022 et début 2023, soit une baisse annuelle de 7%. Le recul est un plus sensible dans les appartements en résidence principale (10,1%) que dans les maisons (7,5%). Le recul est surtout particulièrement fort chez les locataires du parc social (-15,7%) alors qu’il n’est que de 6,8% pour les propriétaires occupants.